« Maman, il veut te dire au revoir » – Comment la trahison de mon mari a brisé ma vie et m’a poussée à tout recommencer en Provence

« Maman, il veut te dire au revoir. » La voix de Paul, mon fils de huit ans, tremblait dans l’encadrement de la porte du salon. Je me souviens du silence pesant qui a suivi, du regard fuyant de mon mari, François, assis sur le canapé, les mains jointes comme s’il priait. Ce jour-là, tout a basculé.

J’ai traversé la pièce, le cœur battant à tout rompre, sentant déjà que quelque chose d’irréversible était sur le point de se produire. François n’a pas levé les yeux vers moi. Il a simplement murmuré : « Il faut qu’on parle. » J’ai su, à cet instant précis, que ma vie telle que je la connaissais allait s’effondrer.

Les mots sont sortis de sa bouche comme des lames : « Je ne peux plus continuer comme ça. J’ai rencontré quelqu’un d’autre… Ça dure depuis deux ans. » Deux ans. Deux ans de mensonges, de regards détournés, de week-ends « professionnels » à Bordeaux qui n’étaient que des prétextes. J’ai senti mes jambes fléchir. Paul s’est approché de moi, cherchant ma main. Je me suis accrochée à lui comme à une bouée dans une mer déchaînée.

La suite est un brouillard : les cris, les larmes, la colère froide qui m’a envahie. Ma mère, Jacqueline, est arrivée en urgence depuis Lyon pour m’aider à tenir debout. Elle a pris Paul sous son aile pendant que je sombrais dans une torpeur douloureuse. Les jours suivants, j’ai erré dans notre appartement du 15e arrondissement comme une âme en peine, chaque objet me rappelant la trahison.

François est parti vivre chez sa maîtresse – une certaine Claire, que je ne connaissais que de nom, une collègue du cabinet d’architectes où il travaillait. Paul passait ses week-ends avec lui, revenant chaque dimanche soir avec des histoires de promenades au Jardin du Luxembourg et de gâteaux faits maison. J’essayais de sourire pour lui, mais à l’intérieur, j’étais brisée.

La famille s’est divisée. Ma belle-mère, Odile, m’a appelée pour me dire qu’elle comprenait son fils : « Tu étais trop prise par ton travail, Lucie… Tu n’as pas vu qu’il souffrait ? » Ces mots m’ont transpercée. Moi qui avais tout sacrifié pour eux – mes soirées à l’hôpital où je suis infirmière, mes nuits blanches à veiller sur Paul quand il était malade…

Un soir d’avril, alors que Paris s’éveillait sous la pluie, j’ai pris une décision folle : partir. Tout quitter. J’avais besoin d’air, d’espace pour respirer loin des souvenirs et des jugements. Ma tante Hélène possédait une petite maison à Lourmarin, en Provence. Elle m’a dit : « Viens te reposer ici aussi longtemps que tu veux. »

Le plus difficile a été d’annoncer mon départ à Paul. Il m’a regardée avec ses grands yeux noisette : « Tu vas revenir, maman ? » J’ai menti : « Bien sûr, mon cœur. » Mais au fond de moi, je savais que rien ne serait plus jamais comme avant.

En Provence, tout était différent : la lumière dorée sur les oliviers, le chant des cigales qui couvrait mes sanglots nocturnes. Les premiers jours, je n’ai fait que dormir et pleurer. Hélène m’a laissée tranquille, déposant chaque matin un bol de café au lait sur la table de la cuisine.

Peu à peu, j’ai repris goût à la vie grâce aux petits riens : le marché du vendredi où j’achetais des tomates gorgées de soleil ; les balades dans les vignes avec le vieux chien d’Hélène ; les conversations avec les voisins – surtout Marc, un apiculteur veuf qui m’a parlé de ses abeilles comme on parle d’une famille.

Mais la culpabilité ne me quittait pas. Paul me manquait terriblement. Nous nous appelions tous les soirs en visio. Il me racontait ses journées d’école à Paris, ses matchs de foot avec ses copains. Un soir, il m’a demandé : « Pourquoi tu es partie si loin ? Est-ce que c’est à cause de papa ? » J’ai senti ma gorge se serrer. Comment expliquer à un enfant que le monde des adultes est fait de failles et de blessures ?

Ma mère m’en voulait d’être partie : « Tu abandonnes ton fils ! » criait-elle au téléphone. François m’a menacée de demander la garde exclusive si je ne revenais pas rapidement à Paris. J’étais prise au piège entre mon besoin vital de me reconstruire et mon devoir de mère.

Un matin d’été, alors que je cueillais des lavandes dans le jardin d’Hélène, Marc est venu me voir :
— Tu sais Lucie… On ne guérit jamais vraiment d’une trahison. Mais on apprend à vivre avec.
Je l’ai regardé longtemps sans répondre. Il avait raison. Je ne serais plus jamais la même femme.

À la rentrée scolaire suivante, j’ai décidé de rentrer à Paris pour Paul – mais différemment. J’ai trouvé un petit appartement dans le 12e arrondissement et j’ai repris mon poste à l’hôpital Saint-Antoine à mi-temps pour être plus présente pour lui. François et moi avons instauré une garde alternée difficile mais nécessaire.

Aujourd’hui encore, chaque fois que je croise François devant l’école ou que j’entends Paul parler de Claire avec admiration, une douleur sourde me traverse. Mais j’essaie d’avancer. Je me reconstruis lentement – pour moi et pour mon fils.

Parfois je me demande : peut-on vraiment refaire confiance après avoir été trahie ? Ai-je eu raison de partir pour mieux revenir ? Et vous… qu’auriez-vous fait à ma place ?