Un Petit-Déjeuner Familial Sous Haute Tension
Le réveil sonne à 7 heures précises, et je me tourne pour éteindre l’alarme avant qu’elle ne réveille Nicholas. Il dort encore profondément, son souffle régulier et apaisant. Mais moi, je suis déjà en proie à une angoisse sourde qui me serre la poitrine. Aujourd’hui, c’est le petit-déjeuner dominical avec ma belle-mère, Hélène. Une tradition que j’ai appris à redouter.
Je me lève doucement, enfilant mon peignoir pour descendre à la cuisine. Le silence de la maison est trompeur, comme le calme avant la tempête. Je commence à préparer le café, espérant que l’arôme réconfortant apaisera les tensions qui ne manqueront pas de surgir.
Nicholas descend enfin, les cheveux en bataille et les yeux encore mi-clos. « Bonjour, ma chérie », murmure-t-il en m’embrassant distraitement sur la joue. Je lui souris faiblement, sachant qu’il n’est pas encore tout à fait réveillé pour affronter ce qui nous attend.
Hélène arrive peu après, impeccablement coiffée et habillée comme si elle se rendait à un gala. Elle me salue d’un hochement de tête froid avant de s’asseoir à table. « Bonjour, maman », dit Nicholas en s’asseyant en face d’elle. Elle lui répond par un sourire crispé.
Le petit-déjeuner commence dans un silence pesant, seulement interrompu par le bruit des tasses de café et des couverts sur les assiettes. Je tente de lancer une conversation légère sur le temps ou les nouvelles locales, mais Hélène ne semble pas intéressée. Elle fixe Nicholas avec une intensité qui me met mal à l’aise.
« Alors, Nicholas », commence-t-elle finalement d’une voix tranchante, « as-tu réfléchi à ce dont nous avons parlé la dernière fois ? »
Je sens Nicholas se raidir à côté de moi. Il évite mon regard et répond d’une voix tendue : « Oui, maman, mais je pense que ce n’est pas le moment d’en parler. »
Je suis perdue. De quoi parlent-ils ? Un secret semble flotter entre eux, un secret dont je suis exclue. Je sens la colère monter en moi, mais je la refoule. Ce n’est ni le lieu ni le moment pour une confrontation.
Hélène ne lâche pas prise. « Tu sais que c’est important pour notre famille », insiste-t-elle.
Nicholas soupire profondément et se tourne enfin vers moi. « Chérie, il y a quelque chose que je dois te dire », commence-t-il avec hésitation.
Mon cœur s’emballe. Qu’est-ce qui peut être si grave pour qu’il ait besoin de l’approbation de sa mère avant de m’en parler ?
« Nous avons discuté d’un projet familial », continue-t-il, évitant toujours mon regard. « Maman pense qu’il serait bon pour nous de déménager plus près d’elle… »
Je reste sans voix. Déménager ? Quitter notre maison, notre quartier ? Tout cela sans même m’en parler d’abord ?
« Et tu es d’accord avec ça ? » Ma voix tremble légèrement.
Il hésite, cherchant ses mots. « Je pense que cela pourrait être une bonne chose… pour nous tous », dit-il finalement.
Hélène intervient alors : « Tu sais bien que Nicholas a besoin de soutien dans sa carrière, et être plus proche de sa famille pourrait l’aider. »
Je sens une vague de frustration m’envahir. Pourquoi est-ce toujours elle qui décide ce qui est bon pour nous ?
« Et moi dans tout ça ? » Je ne peux m’empêcher de demander, ma voix plus forte que je ne l’aurais voulu.
Nicholas me regarde enfin dans les yeux, et je vois qu’il est aussi déchiré que moi par cette situation. « Je veux ce qu’il y a de mieux pour nous deux », dit-il doucement.
Le reste du petit-déjeuner se déroule dans un silence tendu. Hélène semble satisfaite d’avoir semé la discorde entre nous, tandis que Nicholas et moi évitons soigneusement tout contact visuel.
Après le départ d’Hélène, je me tourne vers Nicholas, cherchant des réponses dans ses yeux fatigués. « Pourquoi ne m’as-tu rien dit ? »
Il passe une main dans ses cheveux en désordre, visiblement accablé par le poids de la situation. « Je voulais te protéger », murmure-t-il.
« Me protéger ? Ou te protéger toi-même des conséquences de tes décisions ? »
Il soupire profondément, réalisant peut-être enfin l’impact de ses choix sur notre relation.
La journée se termine dans une ambiance morose, chacun perdu dans ses pensées. Je me demande comment nous avons pu en arriver là, à laisser une tierce personne influencer autant notre vie commune.
En me couchant ce soir-là, je ne peux m’empêcher de réfléchir : est-ce vraiment cela que signifie être une famille ? Se sacrifier pour les autres au point de s’oublier soi-même ?