Pardonne-moi, Camille – Murmura la Belle-mère en Pleurs – Dieu M’a Déjà Punie : La Belle-mère Regarda Son Petit-fils et Sanglota
« Tu n’es pas digne de mon fils ! » Les mots de ma belle-mère, Françoise, claquèrent dans la cuisine comme un coup de tonnerre. Je serrai fort la main de mon fils, Paul, qui jouait à mes pieds, inconscient de la tempête qui grondait au-dessus de sa tête. Mon mari, Julien, était resté figé, incapable de prendre ma défense. C’était toujours comme ça depuis notre mariage : moi, Camille, la pièce rapportée, l’intruse dans cette famille bourgeoise du centre de Lyon.
Je me souviens encore du premier dîner chez eux. Françoise m’avait scrutée de la tête aux pieds, son regard froid glissant sur ma robe Zara – trop simple pour elle, sans doute. « Tu fais quoi déjà dans la vie ? » avait-elle demandé d’un ton faussement intéressé. « Je suis institutrice », avais-je répondu, fière malgré tout. Elle avait esquissé un sourire pincé : « Ah… Ce n’est pas très ambitieux. »
Depuis ce jour, chaque repas était un champ de mines. La moindre remarque sur l’éducation de Paul devenait une critique déguisée : « Tu le laisses trop faire », « À son âge, Julien savait déjà lire », « Il faudrait penser à lui donner des cours particuliers… » J’essayais d’ignorer, de sourire, de me dire que ça passerait. Mais rien ne passait.
Julien, lui, restait silencieux. Il disait qu’il ne voulait pas choisir entre sa mère et moi. Mais à force de ne rien dire, il choisissait toujours le camp du silence – et donc celui de sa mère.
Un soir d’hiver, alors que la neige tombait sur les toits de la Croix-Rousse, tout a explosé. Françoise était venue garder Paul pendant que nous allions à une réunion parents-profs. À notre retour, j’ai trouvé mon fils en larmes dans sa chambre. Il répétait : « Mamie dit que tu n’es pas gentille… Que tu veux m’éloigner de papa… »
J’ai senti une colère froide m’envahir. J’ai foncé dans le salon où Françoise tricotait tranquillement. « Pourquoi lui as-tu dit ça ? » ai-je crié. Elle a levé les yeux vers moi, sans ciller : « Je dis la vérité. Tu n’as jamais été faite pour cette famille. »
Julien est entré à ce moment-là. Il a vu mon visage déformé par la colère et celui de sa mère, impassible. Il a soupiré : « Camille, tu exagères… »
Ce soir-là, j’ai pris Paul dans mes bras et je suis partie chez ma sœur, Élodie. Elle m’a accueillie sans poser de questions. Dans son petit appartement du Vieux Lyon, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps.
Les semaines suivantes ont été un enfer. Julien m’appelait tous les soirs mais ne venait jamais me voir. Il disait que sa mère était malade, qu’il devait s’occuper d’elle. Je me sentais trahie, abandonnée.
Un jour, alors que je déposais Paul à l’école, j’ai croisé Françoise devant la grille. Elle avait l’air fatiguée, vieillie soudainement. Elle m’a arrêtée d’une main tremblante : « Camille… Je peux te parler ? »
Je voulais fuir mais quelque chose dans son regard m’a retenue.
Nous sommes allées nous asseoir sur un banc du parc voisin. Elle a sorti un mouchoir et s’est mise à pleurer doucement.
« Je t’ai fait du mal… Je le sais… Mais tu dois comprendre… J’ai perdu mon mari très jeune. Julien était tout pour moi. Quand il t’a rencontrée, j’ai eu peur qu’il m’oublie… J’ai voulu te repousser… Mais Dieu m’a déjà punie : je suis seule maintenant… Et je vois bien que Paul ne veut plus me parler… »
Elle sanglotait comme une enfant perdue. J’ai senti ma colère se fissurer.
« Pourquoi ne pas l’avoir dit plus tôt ? Pourquoi toute cette haine ? »
Elle a haussé les épaules : « La peur… La jalousie… Et puis l’orgueil… »
Nous sommes restées là longtemps sans parler. Le vent faisait danser les feuilles mortes autour de nous.
Quelques jours plus tard, Julien est venu me voir chez Élodie. Il avait l’air épuisé.
« Maman est malade… Vraiment malade cette fois », a-t-il murmuré.
Je suis retournée à la maison avec Paul. Françoise était alitée, le visage pâle mais apaisé.
Un après-midi, alors que je lisais une histoire à Paul dans sa chambre, elle m’a appelée d’une voix faible :
« Camille… Viens… »
Je me suis assise près d’elle. Elle a pris ma main dans la sienne.
« Pardonne-moi… Je t’en supplie… Je ne veux pas partir avec ce poids sur le cœur… »
J’ai senti mes yeux se remplir de larmes.
« Je ne sais pas si je peux oublier tout ce que tu m’as fait… Mais je vais essayer… Pour Paul… Pour Julien… »
Elle a souri faiblement et a fermé les yeux.
Françoise est partie quelques semaines plus tard. À ses obsèques, j’ai vu des photos d’elle jeune avec Julien bébé dans les bras. J’ai compris alors que derrière sa dureté se cachait une immense peur de perdre ceux qu’elle aimait.
Aujourd’hui encore, je repense à tout cela en regardant Paul jouer dans le jardin. Est-ce que le pardon efface vraiment les blessures ? Ou bien certaines cicatrices restent-elles à jamais gravées en nous ? Qu’en pensez-vous ?